Actualités du cabinet

Le rapport successoral d’une exploitation

Auteur : GAUCHER-PIOLA Alexis
Publié le : 01/04/2006 01 avril avr. 04 2006

En matière de succession, la tradition juridique française, héritée des principes révolutionnaires, est imprégnée de la notion d’égalité dans le partage. Or, cette égalité a pu être rompue lorsque le défunt a fait, avant son décès, des libéralités à certains successibles.

Précisions"En matière de succession, la tradition juridique française, héritée des principes révolutionnaires, est imprégnée de la notion d’égalité dans le partage.

Or, cette égalité a pu être rompue lorsque le défunt a fait, avant son décès, des libéralités à certains successibles.

Afin d’assurer l’égalité du partage entre les cohéritiers, l’article 829 du Code civil précise que chaque cohéritier doit faire rapport à la masse des dons qui lui ont été faits.

Tous les dons ne sont pas à rapporter, et il faut distinguer entre les dons faits en avancement d’hoirie et les autres dons ou libéralités faits de façon préciputaires.

Les dons en avancement d’hoirie peuvent être définies come une donation anticipée qui s’imputera sur la part héréditaire du gratifié.

Ces dons sont donc à rapporter pour leur valeur à la masse successorale existant au moment du décès du défunt, afin de liquider et de partager la masse des biens existant au jour de la personne décédée.

Les libéralités dites préciputaires peuvent être définies comme des donations qui manifestent la volonté du défunt d’augmenter volontairement la part de l’héritier, ce qu’il peut faire dans une certaine limite: celle de la quotité disponible.

Ces donations préciputaires ne sont rapportables.

D’une manière générale, la Loi pose la présomption que les donations faites à un héritier doivent être rapportées à la masse successorale afin d’établir l’égalité dans le partage entre les cohéritiers (article 843 du Code civil).

A titre d’exemple, un descendant qui a reçu de son père décédé une exploitation agricole dans le cadre d’une donation, doit la rapporter pour sa valeur dans la masse partageable afin de vérifier l’égalité du partage entre les cohéritiers.

Selon la Loi, la valeur rapportée est celle du bien donné à l’époque du partage successoral mais compte tenu de son état réel à l’époque de la donation (article 860 du Code civil).

Il s'agit là d'une règle de calcul de la valeur du bien à rapporter à la masse des biens existants au jour du décès du père.

Par conséquent il convient, pour évaluer le montant de cette valeur, de faire abstraction des améliorations ou des dégradations qui ont pu être faites du chef du donataire.

En pratique, la difficulté provient de ce qu’il est toujours délicat de déterminer avec précision quel était l’état du bien au jour de la donation !

Souvent les donations ont été faites de nombreuses années avant le décès et aucun état des lieux n'a été dressé, permettant de connaître l'état du bien donné à l'époque.

Dans deux Arrêts des 31 mai 2005 et 4 octobre 2005, la Cour de Cassation impose de rapporter la preuve de l’état de ce bien dans le cadre du calcul de sa valeur.

Dans l’Arrêt du 31 mai 2005 de la Cour de Cassation, un donataire avait reçu un terrain qu’il avait ensuite viabilisé du vivant du donateur.

Pour prendre en compte la notion d’état du bien au jour de la donation, la Cour d’Appel avait retenu sa valeur actuelle et pratiqué un abattement forfaitaire de 25 %.

La décision de la Cour d’Appel a été censurée par la Cour de Cassation, laquelle considère qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher la valeur des biens à l’époque du partage sur la base de leur état à l’époque de la donation, la Cour d’Appel a violé l’article 860 du Code civil. (voir supra cet article).

Dans le second arrêt du 4 octobre 2005, il s’agissait de la donation d’une exploitation agricole en 1985.

La donatrice est décédée en 1986, et un Expert avait été désigné en 1992 pour rechercher sa valeur en tenant compte de son état au jour de la donation.

Sans que l’arrêt de la Cour de Cassation ne fournisse d’explications sur les causes de ce différé, il apparaît que le partage n’a été réalisé que plusieurs années après.

La Cour d’Appel a décidé qu’une nouvelle expertise n’était pas nécessaire et qu’il suffisait de faire varier la valeur retenue par l’Expert en 1992, en fonction de l’évolution du barème des terres agricoles pour les immeubles non bâtis et de l’indice INSEE du coût de la construction pour les bâtiments.

La Cour de Cassation décide qu’en suppléant à la recherche du prix que la vente des biens dans un marché réel aurait pu procurer, la Cour d’Appel a encore violé l’article 860 du Code civil.

Par conséquent, la Cour de Cassation impose de démontrer la valeur réelle du bien à rapporter et refuse toute approximation fondée sur un correctif, qu’il s’agisse d’un indice ou d’un abattement forfaitaire.

Bien entendu, l’ensemble de ces observations ne vaut qu’en cas de conflit dans le cadre d’un partage successoral.

Dans la majeure partie des situations, les partages successoraux se font à l’amiable, ce qui permet de fixer de façon conventionnelle une telle valeur en s’exonérant des conditions imposées par les textes.





Cet article n'engage que son auteur.

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